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Le destin extraordinaire d’un petit pois devenu si ordinaire

Cet article à été écrit par L'Esprit Jardin
29 juillet 2018

Commun et mĂȘme banal aliment aujourd’hui, le modeste petit pois (Pisum sativum) de la famille des FabacĂ©es a pourtant non seulement contribuĂ© à l’alimentation humaine, mais aussi à faire avancer la science. C’est le destin extraordinaire d’un petit pois devenu si ordinaire que je vais vous raconter.

Les premiers pois pour les premiers villages des hommes
Le petit pois est l’un des plus vieux lĂ©gumes cultivĂ©s par l’homme. D’aprĂšs les Ă©tudes scientifiques, il a d’abord Ă©tĂ© domestiquĂ© dans le croissant fertile du Proche-Orient puis a ensuite migrĂ© vers l’Europe, l’Égypte et l’Asie centrale et orientale. Des graines datant du nĂ©olithique ancien (7000 à 6000 ans avant J.-C.) de cette lĂ©gumineuse ont Ă©tĂ© retrouvĂ©es en Irak et en Turquie.
Le pois a accompagnĂ© la domestication des autres plantes alimentaires fondamentales : le blĂ©, l’orge, la lentille et le pois chiche, et probablement Ă©galement celle du mouton et de la chĂšvre. Il était alors consommĂ© sec, on le concassait avant de le cuire. Sa consommation en petit pois frais est trĂšs rĂ©cente et daterait apparemment de 1610 en Hollande.

D’oĂč vient son nom ?
« Pois » dĂ©rive du latin pisum, lui-mĂȘme empruntĂ© au grec. Selon certains auteurs, ce terme dĂ©coulerait d’un verbe signifiant « casser » en latin. Le terme est apparu en français vers la fin du XIIe siĂšcle, d’abord sous la forme peis. Pendant longtemps, on ne cultivera le pois que pour sa graine sĂšche ; le pois frais fut mentionnĂ© pour la premiĂšre fois au XIIe siĂšcle (Angleterre). Il faudra attendre 1536 pour en lire une description dĂ©taillĂ©e dans un ouvrage français.

Petits pois  aristocratiques
Jusqu’au dĂ©but du VIIIe siĂšcle, le petit pois resta une raretĂ© vendue à des prix tellement Ă©levĂ©s que seules la noblesse et l’aristocratie pouvaient se l’offrir. Les riches familles de l’époque dĂ©pensaient des sommes colossales pour le servir à leur table et étaient prĂȘtes à payer plus encore pour ĂȘtre les premiers à les offrir à leurs invitĂ©s.
Le pois vert ou petit pois tel que nous le connaissons n’apparut en France qu’au XVIe siĂšcle oĂč il fit d’abord les dĂ©lices des grands de la cour. De retour de GĂȘnes, un marchand français en offrit un cageot au roi Louis XIV. Ce dernier en raffola d’emblĂ©e et demanda à son jardinier La Quintinie de produire des petits pois de primeur.

La Quintinie et ses primeurs
Roi gourmand, Louis XIV avait un appĂ©tit fĂ©roce. La Quintinie s’ingĂ©niait à satisfaire les dĂ©sirs de son souverain ; il porta la culture à son sommet en introduisant la notion de primeur.
Il mit au point des techniques Ă©laborĂ©es pour obtenir des rĂ©coltes à contre-saison : fumiers frais en provenance des Ă©curies, diverses expositions et utilisation d’abris de verre et de cloches.
Les fumiers furent choisis en fonction de la nature de la terre : les fumiers de bƓuf, de vache ou de cheval ont des effets diffĂ©rents, mais tous sont « comme une espĂšce de monnaie qui rĂ©pare les trĂ©sors de la terre ». Les extraordinaires rĂ©sultats obtenus firent la renommĂ©e du Potager de Versailles.

Le petit pois et la naissance de la génétique moderne
C’est grĂące aux petits pois cultivĂ©s dans le jardin de son monastĂšre et utilisĂ©s comme support pour ses Ă©tudes que le prĂȘtre autrichien George Mendel dĂ©couvrit les bases des lois de l’hĂ©rĂ©ditĂ©. En 1866, il publia ses premiers rĂ©sultats, constatant particuliĂšrement l’uniformitĂ© des hybrides de 1ere gĂ©nĂ©ration. C’est lui qui a Ă©tabli la loi dite de la puretĂ© des gamĂštes, les bases d’une science appelĂ©e maintenant la
 gĂ©nĂ©tique.
C’est en rĂ©alisant pendant de nombreuses annĂ©es des croisements dans son potager qu’il put constater les variations de dimension, de forme et de couleur. PubliĂ©s sous le titre Versuche ĂŒber Pflanzen-Hybriden, ses travaux n’ont toutefois Ă©tĂ© reconnus qu‘au dĂ©but du XXe siĂšcle.
Il choisit le petit pois pour son cycle court, sa facilitĂ© de culture, son caractĂšre autogame facilitant la crĂ©ation de lignĂ©es pures et le contrĂŽle des hybridations, l’existence de cultivars aux caractĂšres diffĂ©renciĂ©s faciles à analyser (couleur des fleurs, couleur et forme des graines et des gousses).
Mendel mourut en 1884 dans l’indiffĂ©rence la plus complĂšte. Aujourd’hui, la gĂ©nĂ©tique est enseignĂ©e dans les Ă©coles et les universitĂ©s.


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